III.—Du mystère en général et de la sainte Trinité
I.—DU MYSTÈRE EN GÉNÉRAL13.—Qu'est-ce qu'un mystère ?Le mot mystère (du gree, chose cachée) signifie, en général, une chose que nous ne comprenons pas. Dans la, religion, un mystère est une vérité que nous ne pouvons pas comprendre, mais que cependant nous devons croire, parce que Dieu l'a révélée. Il est évident que Dieu, esprit infini, connaît plus de choses que l'homme, esprit borné. S'il lui plaît de révéler quelqu'une de ses connaissances qui dépassent nos horizons restreints, il est libre de le faire, et alors nous aurons la connaissance de la vérité qu'il aura plu à Dieu de nous découvrir. Est-ce à dire que nous en aurons l'intelligence, et que nous la comprendrons comme Dieu la comprend ? Non, il se peut que cette intelligenee dépasse ici-bas notre puissance. Dès lors cette vérité restera pour nous un mystère incompréhensible; mais cependant nous devrons le croire. Et pourquoi ? C'est parce que Dieu, qui l'énonce et le révèle, étant la science même et la vérité, ne peut ni se tromper ni nous tromper. 14.—Est-il étonnant qu'il y ait des mystères dans la religion ? La religion étant un lien, un rapport d'union entre Dieu, infini dans ses perfections, et l'homme, être fini et borné dans ses attributs, on conçoit qu'il y ait en elle un côté inaceessible à l'intelligence humaine, et que le mystère incompréhensible se dresse devant nous. D'ailleurs, ce n'est pas seulement dans la religion qu'il y a des mystères. Dans la nature même et dans les sciences, il y a une foule de choses que notre raison ne peut comprendre. Ainsi, par exemple, le grain de blé qui, jeté en terre, se corrompt, germe et produit soixante ou cent grains de la même espèce; la chenille, qui devient chrysalide et papillon; les astres, qui roulent dans l'espace; la nourriture, qui devient notre chair et notre sang; la lumière, la vapeur, l'électricité, sont autant de choses très mystérieuses, malgré les explications qu'on s'efforce d'en donner. A plus forte raison, n'est-il pas étonnant qu'il y ait des mystères en Dieu et dans la religion. Nous pouvons même dire que les mystères de la religion sont relativement peu nombreux. On les résume à trois principaux: le mystère de la sainte Trinité, le mystère de l'Incarnation et le mystère de la Rédemption.
II.—DU MYSTÈRE DE LA SAINTE TRINITÉ15.—Qu'est-ce que le mystère de la sainte Trinité ?C'est le mystère d'un seul Dieu en trois personnes; le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Ces trois personnes, distinctes entre elles, ne font cependant qu'un seul Dieu, parce qu'elles n'ont qu'une même nature divine. La première personne est appelée Père, parce qu'elle est le principe et engendre, de toute éternité, un Fils qui lui est consubstantiel; la seconde est appelée Fils, parce qu'elle est engendrée par le Père de toute éternité, ayant avec lui une même nature ou substance. La troisième personne est le Saint-Esprit, qui procède à la fois du Père et du Fils, aussi de toute éternité; en sorte que les trois personnes divines sont égales en tout, n'ayant qu'une seule et même Substance, sans que l'une soit ni plus ancienne, ni plus puissante, ni plus parfaite que l'autre. 16.—Comment connaissons-nous le mystère de la sainte Trinité? Nous le connaissons parce que Dieu lui-même nous l'a révélé. Ce mystère était peu connu des Juifs; mais, dans son Évangile, Notre-Seigneur a souvent parlé de son Père et du Saint-Esprit, et il nous a enseigné qu'ils étaient avec lui un seul et même Dieu. Il a envoyé ses apôtres baptiser les nations au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Saint Jean nous dit: « Il y en a trois qui rendent témoignage dans le ciel, le Père, le Verbe (ou le Fils), et le Saint-Esprit, et ces trois ne Sont qu'un. " (I Ep., v. 7.) La Trinité s'est manifestée dans le Baptême de Notre-seigneur et dans sa Transfiguration: le Père, parlant du haut du ciel; le Fils, étant glorifié, et le Saint-Esprit descendant sur lui sous la forme d'une colombe ou d'une nuée lumineuse. Aussi la croyance à la sainte Trinité a-t-elle toujours fait partie du dogme catholique: nous en trouvons l'expression dans les Symboles de notre foi, et plus particulièrement en celui de saint Athanase. 17.—Pouvons-nous concevoir le mystère de la satnte Trinité? Bien que nous ne puissions pas comprendre le mystère de la Trinité, nous pouvons cependant le concevoir, c'est-à-dire nous en faire une idée. Voici comment les docteurs s'expriment: " Dieu le Père, étant 1'Être infiniment intelligent et actif, n'a jamais été un seul instant sans se connaître. Or cette connaissance infinie, parfaite, égale à Dieu, quoique distincte de lui, c'est sa Sagesse ou son Verbe, qui, possédant nécessairement une réalité à part, s'appelle le Fils.—Mais Dieu le Père se connaissant tel qu'il est, et connaissant son Fils, qui est l'image de sa personne, avec ses infinies perfections ne peut ne pas l'aimer. Et ce Fils, pareillement connaissant son Père, ne peut non plus ne le point aimer d'un amour éternel et infini, or cet amour réciproque du Père et du Fils, réalité nécessairement subsistante, s'appelle la troisième personne, ou le Saint-Esprit. Il procède à la fois du Père et du Fils, et il est Dieu aussi. étant infini et éternel comme eux. » Au reste, pour nous faciliter la conception de ce dogme, Dieu a jeté partout des images de sa Trinité dans la nature. Ainsi la racine, la tige et les rameaux ne forment qu'une seule plante; dans le soleil, le foyer la lumière et la chaleur, ne font qu'un seul astre; dans la famille, le père, la mère, l'enfant, sont comme une trinité de la terre. L'homme a une triple vie: animale intellectuelle, surnaturelle. Son âme, principalement, est comme un reflet de la Trinité céleste: être unique, elle a trois facultés, sensibilité, intelligence, volonté; elle est le principe de sa pensée et de son amour. Qu'en nous ces trois choses: principe, pensée, amour, deviennent chacune une personnalité, et nous aurons la trinité dans l'unité. 18.—Quelles sont les oeuvres où opérations des trois personnes de la sainte Trinité ? Les trois personnes divines ayant la même substance divine, n'agissent pas extérieurement l'une sans l'autre, et tout, dans le monde, est leur oeuvre commune. —Toutefois, par appropriation, et par manière de parler, on attribue généralement au Père la création, comme oeuvre de puissance; au Fils la rédemption, comme œuvre de sagesse, et au Saint-Esprit la sanctification comme oeuvre de sainteté. Mais, en réalité, les trois personnes divines coopèrent à toutes ces œuvres. Il faut remarquer toutefois que la rédemption a été par exécution personnelle, l'oeuvre du fils; car la seconde personne toute seule s'est faite homme. et nous a rachetés. CONCLUSION PRATIQUE Vouloir sonder le mystère de la sainte Trinité ne nous avancerait à rien. Saint Augustin, qui essaya de le faire avec son grand génie, fut rappelé par un ange à l'humilité qui convient à notre esprit borné. Il est préférable de nous exercer à la reconnaissanee envers la sainte Trinité, qui enveloppe de ses faveurs toute notre vie de chrétien, c'est au nom de la sainte Trinité que nous sommes baptisés, confirmés, purifiés dans la Pénitence, sanctifiés dans l'Extrême-Onecion. Et la dernière prière récitée dans notre agonie sera celle-ei: « Pars, âme chrétienne, au nom du Père qui t'a créée, au nom du Fils qui t'a rachetée, au nom du Saint-Esprit qui t'a sanctifiée.. » En conséquence, exerçons-nous honorer la très auguste Trinité en faisant avec pieté le signe de la croix qui nous la rappellent et en récitant avec attention le Gloria Patris et la Doxologie qui termine les psaumes d les hymnes liturgiques. |