Au cœur de la souffrance… l’espérance

 

Monique Anctil, r.s.r.

 

 

 


On raconte qu’une petite fille revenait de la maison voisine où l’enfant de huit ans venait de mourir de manière tragique. Son père lui demande : «Pourquoi y es-tu allée ? » Et la petite de répondre : « Pour consoler sa maman ! » « Et que pouvais-tu bien faire, toi si petite, pour la consoler ? », reprend le père un peu agacé. Avec la candeur de son cœur d’enfant, elle répond : « Je suis montée sur ses genoux et j’ai pleuré avec elle ! »

 

Comment demeurer indifférents à une attitude empreinte d’une si profonde compassion ? Nous sommes invités à méditer le comportement des jeunes enfants qui nous manifestent, bien humblement, une grande espérance. Car c’est dans la gratuité d’un geste d’amour spontané que se révèle la plus haute espérance.

 

Un jour ou l’autre, jeunes ou adultes, nous sommes confrontés à la souffrance. S’enfermer dans la résignation ou sombrer dans la révolte et la dépression s’avère alors une voie facile.

 

S’engager plutôt sur un chemin d’espérance, c’est traverser un long désert, les yeux fixés sur une source qui au loin nous invite et creuse en nous un vif désir de nous y désaltérer ; c’est expérimenter la promesse faite par Dieu à son prophète Isaïe : « Moi le Dieu d’Israël, je ne les abandonnerai pas. Sur les monts chauves je ferai jaillir des fleuves, et des sources au milieu des vallées. Je ferai du désert un marécage et de la terre aride des eaux jaillissantes » (41, 17-18). S’engager sur un chemin d’espérance, c’est oser croire qu’au bout du tunnel, la lumière jaillira, plus intense et plus radieuse, dissipant toutes ténèbres ; c’est voir se réaliser dans notre propre vie cette autre prophétie d’Isaïe : « Je conduirai les aveugles par un chemin qu’ils ignorent, par des sentiers qu’ils ne connaissent pas je les ferai cheminer, devant eux je changerai l’obscurité en lumière » (42, 16).

 

Les Évangiles présentent un message de vie et d’espérance. Elles étaient nombreuses les personnes venant à Jésus avec une foi confiante pour obtenir la guérison. La démarche du lépreux commence par un acte de confiance : « Si tu veux, tu peux me purifier » (Mt 8, 2). Par sa profession de foi : « Dis seulement une parole et mon enfant sera guéri » (Mt 8, 8), le centurion permet à son enfant de vivre.

 

Parfois, Jésus exigeait un engagement de foi de la part des personnes qu’il guérissait. À l’aveugle-né, il dit : « Va te laver à la piscine de Siloé ( Jn 9,7). Au paralytique, incapable de se déplacer, il dit : « Lève-toi, prends ton grabat et marche » (Jn 5, 8). En d’autres occasions, le malade devait être porté par la foi de ses frères qui, forts de leur espérance en la puissance de Jésus, imploraient la guérison. Pensons aux porteurs du paralytique qui, poussés par une foi audacieuse et ingénieuse, présentent le malade à Jésus par une ouverture pratiquée sur le toit de la maison (Mc 2, 1-12). Et puis, à ce centurion venant en toute humilité implorer la guérison de son serviteur (Lc 7, 1-10), et à ce fonctionnaire royal demandant avec foi la guérison de son fils (Jn 4, 46-54).

 

Ce thème de l’espérance au cœur de la souffrance et la pédagogie de Jésus face à la souffrance nous amènent à deux questions :

• Comment garder forte l’espérance lorsque la souffrance nous étreint ?

• Comment allumer la flamme de l’espérance dans le cœur de nos sœurs et de nos frères qui traversent le désert de la souffrance ?

 

Au cœur de notre propre souffrance ou des tempêtes qui troublent notre quotidien jusqu’à parfois nous ébranler dans notre foi, il faut d’abord avoir la certitude que la souffrance ne peut être que temporaire ; elle n’est pas une destination, mais un passage et un passage qui débouche sur une résurrection certaine. Avec le psalmiste, nous pouvons alors chanter : « Je t’exalte, Yahvé, qui m’as relevé… vers toi j’ai crié, tu m’as guéri. Tu as tiré mon âme du shéol me ramenant d’entre ceux qui descendent à la fosse » (Ps 30-29, 2-4). Chaque moment de souffrance jeté en terre par la foi confiante est une semence de résurrection : « Si le grain de blé jeté en terre ne meurt pas il demeure seul, mais s’il meurt il porte beaucoup de fruits» (Jn 12, 24). La souffrance devient alors porteuse de vie nouvelle et moyen de croissance car elle permet de nous acheminer vers l’essentiel.

 

Il nous faut, pour cela, persévérer dans l’espérance et, bien sûr, cela ne va pas de soi. Ce qui justifie notre persévérance est la foi en la vie, ce don merveilleux que nous sommes invités à faire fructifier par le don de nous-mêmes avec et par amour, car « il n’y a pas de plus grand amour que de livrer sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13).

 

Notre condition d’hommes et de femmes, sauvés par le Sang du Christ, débouche sur la vie, cette vie de l’Esprit, vie nouvelle et éternelle. Nous qui cheminons dans la foi au Dieu de Jésus Christ, nous pouvons et devons opposer au risque de l’angoisse, de la tristesse, de la peur, notre confiance de fils et de filles bien-aimés du Père qui continue d’agir en nous pour nous transformer. L’espérance soutenue au cœur de l’expérience de la souffrance nous empêche de nous installer dans le monde présent « car nous n’avons pas ici-bas de cité permanente », mais nous vivons en espérance d’une cité éternelle, là où il n’y aura ni pleurs, ni cris, ni larmes (Ap 21, 4).

 

L’espérance fondée sur la foi en Dieu fait passer dans les actes l’amour, la paix et la joie, premiers fruits de l’Esprit. S’il se trouve près de toi une personne qui souffre, qui est en mal de vivre, pleure avec elle, comme nous y invite saint Paul : « Pleurez avec ceux qui pleurent… » (Rm 12, 15). C’est ce qu’a fait la petite fille présentée ci-haut. Laisse-toi émouvoir par la souffrance de l’autre ; la compassion, qui est le visage concret de l’amour, voit et regarde, écoute et accueille ; elle comprend avec le cœur. Le Christ, dans l’Évangile, se laisse émouvoir par toutes les souffrances qu’il rencontre sur sa route. Il pousse si loin sa compassion envers les gens en situation de détresse qu’il considère comme fait à lui-même ce que nous faisons aux plus petits d’entre nos frères et sœurs (Mt 25, 31-40).

 

Jésus a expérimenté l’épreuve de la souffrance et de l’angoisse humaine sur les plans où elle se manifeste de la façon la plus radicale et la plus difficile à dépasser, l’angoisse devant l’épreuve inéluctable de la mort, à Gethsémani : « Mon Père, s’il est possible, éloigne de moi cette coupe » (Mt 26, 39) ; l’angoisse au cœur même de sa vie de foi et d’espérance, dans le cri au Calvaire : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46). Ému de pitié devant toutes souffrances humaines, Jésus est venu en aide à ceux et celles qui se présentaient à lui avec leur poids de souffrance. Il les a portés dans son corps comme dans sa prière pour les présenter à Dieu. Encore aujourd’hui, les malades, les blessés, les angoissés, quelle que soit la cause de leur épreuve, ne sont pas abandonnés par Dieu : Jésus priant est auprès de Dieu, il prie avec eux et pour eux. Il se fait notre grand Intercesseur auprès du Père.

 

À l’exemple de Jésus, nous pouvons partager notre prière quotidienne par laquelle nous parlons au Seigneur d’un frère ou d’une sœur qui souffre. Nous devenons à la manière de Jésus « intercession » auprès du Père en sa faveur. Pour nous, qui avons été renouvelés dans l’Esprit de Pentecôte, nous avons cette grande grâce de pouvoir offrir à nos frères et sœurs blessés et souffrants la prière de foi avec imposition des mains. Quelle œuvre d’évangélisation pouvons-nous faire à travers ce ministère !

 

Une manière de soulever l’espérance dans le cœur de nos frères et sœurs qui souffrent est d’être porteurs d’une joie lumineuse. Rappelons cette magnifique parabole du petit rayon de soleil : « Un jour, un petit rayon de soleil entend dire qu’il existe dans le monde un lieu affreusement triste où il pleut de l’ennui à verse ! Aussitôt, notre petit rayon de soleil se met en route, il parcourt la terre entière, il visite les lieux les plus sombres, il pénètre dans les caves et les souterrains, il fouille les prisons et les taudis… mais nulle part il trouve de la tristesse… C’est qu’il transporte la lumière avec lui ».

 

Ainsi, soyons des rayons de soleil et transportons la lumière afin que partout où nous passons, tout devienne lumineux !

 

De la communauté Notre-Dame du Saint Rosaire, sœur Monique Anctil est responsable du Renouveau charismatique du diocèse de Rimouski. Elle est aussi membre du comité de rédaction de la revue Selon Sa Parole.



Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC) traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église

Selon Sa Parole mars-avril vol. 28 numéro 2

 

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Dernière mise à jour 25 mai 2002

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