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LA SAINTETÉ: UNE VICTOIRE OU UN CADEAU?

Dominic LeRouzès

C'est passionnant de jeter un regard sur notre société! Avez-vous remarqué que pour bien vivre dans notre monde, il faut être le meilleur! Dans le sport, il faut être Wayne Gretzky; dans la musique, on vise Mozart; dans les sciences, on cherche à ressembler à Einstein et en cuisine, l'idéal d'une vie réussie, c'est Soeur Angèle! Mais pourquoi donc cette folie à s'arracher les premières places, à monter sur les podiums, à être reconnu par tous comme le plus beau, le plus fin, le meilleur, le plus compétent, etc. Ah! Quel mystère insondable que celui du coeur de l'homme! Parce qu'il veut être aimé... L'être humain a plus besoin d'amour que d'air et de nourriture. C'est vrai! Qu'on soit cuisinière, aviateur, philosophe, chanteuse ou mécanicien, on est toujours, toujours, toujours à la recherche d'un petit compliment, d'une bonne pensée, d'un regard fier de nous. Et c'est normal, car notre coeur est fait pour être aimé. Le problème, c'est qu'on est insatiable, on n'en a jamais assez; on a faim d'amour comme si ça faisait quarante ans qu'on avait pas mangé! Et c'est vrai pour tout le monde. Quand on a faim comme ça, on cherche inlassablement de la nourriture et, parfois, on "bouffe" n'importe quoi. C'est pourquoi on est autant à la recherche de l'Amour et c'est aussi pourquoi tant de personnes se font mal en faisant n'importe quoi pour combler ce vide.

UN PROBLEME

Saint Augustin disait que l'âme ne trouve pas de repos tant qu'elle ne se repose pas en Dieu. Le secret, il est là... Dieu. Les saints, pour leur part, l'ont bien compris. Les saints sont ces personnes qui ont choisi de vivre ce secret d'amour. Ce sont des hommes et des femmes qui disent à Dieu: "J'ai eu beau essayer de me combler de toutes sortes de choses mais je vois que c'est toi, Seigneur qui me combles." A l'heure où la société nous murmure sans cesse de nous attacher aux créatures, l'Évangile de sainteté nous rappelle cette vérité du coeur: attache-toi au Créateur.

Pourtant, nous, chrétiens, avons beau comprendre cela, il reste que nous avons toutes les difficultés du monde à le saisir et à le mettre en pratique. Mettre Dieu à la première place dans nos vies est encore très difficile, même après avoir récité la très engageante prière d'abandon de Charles de Faucauld. Néanmoins, nous aspirons à la sainteté! Oui! Ah oui! plus que tout Seigneur. Mais voilà que même dans notre recherche de la sainteté nous avons un problème.

UN FAUX DÉPART

Imaginez tous les chrétiens d'aujourd'hui sur la ligne de départ de la course à la sainteté. Le pied bien appuyé sur le bloc de départ, nous repassons dans notre tête les grands modèles victorieux des courses précédentes: saint François, sainte Thérèse, etc. Puis, serrant les dents, arquant le dos, on est prêt à tout pour gagner cette course, coûte que coûte. Bang! C'est le départ. Le coeur commence à battre plus fort, la sueur perle, les heures de prière s'accumulent, "je suis un saint", on devance les autres compétiteurs, le jeûne se fait de plus en plus austère, la foule applaudit, on avance, on accumule les heures de travail de manière à être le plus édifiant possible, la foule est en délire, "je suis un saint", les compétiteurs s'affaissent un à un sur la piste de course, mortifications à l'extrême, la foule perd la tête. Et c'est la victoire! "Je suis un saint! Je suis un saint, j'ai battu tout le monde, venez! venez! venez me canoniser!"

Oups... Il me semble que ça ne marche pas... Pourtant, n'est-ce pas souvent là notre vision de la sainteté: une compétition contre les autres? La sainteté, c'est aimer, c'est laisser Dieu vivre en nous dans sa plénitude d'amour. Dans toute cette "folie" décrite plus haut il n'y a pas d'amour et Dieu n'y est pas présent. Où sont amour et charité, Dieu est présent.

SAINTETÉ RÉALISTE

La sainteté communautaire est un vaccin contre la sainteté de type "compétition". Nous formons le Corps du Christ, vous êtes d'accord? (cf. 1 Co 12,12-31). Nous sommes les membres d'un seul et même corps. Nous avons beau être un orteil ou un nez (ce qui peut nous paraître moins noble), c'est quand même un seul sang et un seul Esprit qui nous anime. Il ne devrait donc pas y avoir de jalousie car c'est Dieu qui nous choisit; il nous place là où nous sommes le mieux. Si le doigt reçoit une nouvelle bague, c'est tout le corps qui se réjouit.

Si les pieds sont chaussés de nouveaux souliers, c'est tout le corps qui se réjouit. Si l'oeil guérit d'une vilaine blessure, c'est tout le corps qui se réjouit. Eh bien quoi? Ainsi devons-nous nous réjouir de la sainteté des autres! Mon frère est saint? Sa sainteté est à moi aussi, car nous faisons partie du même corps qu'est l'Église. La sainteté de mon frère édifie l'Église: de la pierre vivante qu'il est il la bâtit à sa manière. De même, quand je commets un péché, c'est l'Église universelle qui en souffre. Mais quand je demande pardon, c'est l'Église tout entière qui en est glorifiée. Pour penser la sainteté, il faut penser "Église"; c'est pour cela que la sainteté de type "compétition" ne tient pas: elle est centrée sur l'individu. Etre saint, c'est un cadeau que je reçois et que je fais à l'Église, et non pas un cadeau que je me paie.

La sainteté communautaire, c'est veiller à ce que l'autre soit heureux. C'est veiller à la sainteté des autres. C'est éviter le mal pour que mon prochain n'ait pas à souffrir. C'est aimer Dieu à temps et à contre-temps, de tout son coeur, de toutes ses forces, de tout son esprit et aimer son prochain comme soi-même. En fait, être saint, c'est s'oublier par amour pour Jésus et pour les autres. Et voilà le mystère que l'on découvre: c'est en donnant que l'on reçoit, c'est en consolant que l'on est consolé, c'est en bénissant qu'on est béni, c'est en étant le dernier que l'on devient le premier, c'est en renonçant à tout que l'on hérite de tout!

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NOTE D'AUTEUR

Dominic LeRouzès est âgé de 23 ans. Il est engagé dans Marie-Jeunesse et habite Québec. Il a terminé des études en sociologie à l'Université Laval de Québec. Il aspire à devenir prêtre et est, depuis quelques mois, séminariste.


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