Pentecôte, fête de l'espérance
Paul-Émile Vignola

Pourquoi n'y aurait-il pas, au fil de l'année liturgique, une fête qui mettrait en lumière chacune des vertus théologales? Nous avons un chant qui dit : " Noël, c'est l'amour ". L'événement célébré à Pâques se donne comme le cœur de notre foi. La Pentecôte me paraît, de son côté, avoir des liens très particuliers avec l'espérance.

Les promesses sont accomplies

On sait que l'Esprit saint, ce jour-là, fut donné à l'Église qui, sans plus attendre, se met en marche. À ce moment s'accomplit une promesse de Jésus à ses disciples : " Vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit saint qui descendra sur vous " (Ac 1, 8). Les Apôtres, qui s'étaient enfermés au Cénacle par crainte des Juifs, sont non seulement libérés de la peur, mais ils se présentent à la foule et parlent avec autorité, nous donnant à voir une autre action du Paraclet : " Quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité, il vous conduira vers la vérité tout entière " (Jn 16, 13).

Ces gens qui, sur les routes de Palestine, s'étaient montrés si lents à comprendre les enseignements du Maître, retrouvent désormais les paroles de Jésus et les rapportent à bon escient. Quand il met en lumière la portée de cet événement, saint Paul considère le don de l'Esprit comme un
" acompte " de l'héritage à venir. Quand le Seigneur promet, il tient parole. Ce que nous avons déjà touché est merveilleux, mais cela demeure un début, une amorce, les " arrhes " de ce qui nous attend lorsque le royaume sera pleinement établi.

Le Catéchisme de l'Église catholique définit l'espérance comme " la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce de l'Esprit Saint " (§ 1817).

Saint Paul établit clairement le lien entre l'espérance et l'Esprit : " L'espérance ne déçoit point, parce que l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous fut donné " (Rm 5, 5). De même que l'eau a jailli du rocher pour abreuver les Hébreux assoiffés au désert, ainsi l'amour de Dieu a été répandu dans les cœurs de ceux qui croient au Christ.

Au jour de la Pentecôte, les Juifs se rappelaient le don par Dieu de la Loi à Moïse. L'alliance entre le Seigneur et son peuple avait été conclue dans le décor grandiose du Sinaï ; désormais, Israël serait le peuple de Dieu et, conséquence de son élection, n'adorerait pas d'autre dieu. Cette Loi écrite sur des tables de pierre, il avait fallu beaucoup de temps pour en faire une règle de conduite ; mais depuis le retour de l'exil à Babylone, son étude et son observance revêtaient une importance primordiale au sein du judaïsme. Cependant, cette Loi demeurait extérieure au cœur des croyants.

Une Loi nouvelle inscrite dans les cœurs

Lorsque le Souffle de Dieu fond sur les disciples de Jésus, rassemblés autour de Marie au Cénacle, une page de l'histoire du Salut est tournée ; le jour même où les Juifs se rappelaient comment le doigt de Dieu avait fixé les dix paroles dans la pierre et mis en place l'Alliance du Sinaï, le même doigt divin inscrit dans les cœurs la loi d'amour et met en place une Alliance nouvelle établie dans le sang de Jésus répandu au Calvaire.

Les oracles des prophètes trouvent leur accomplissement. " Voici l'alliance que je conclurai avec la maison d'Israël après ces jours-là, oracle du Seigneur. Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l'écrirai dans leur cœur ", avait écrit Jérémie (31, 33). " Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, j'ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon Esprit en vous et je ferai que vous marchiez selon mes lois et que vous observiez et pratiquiez mes coutumes ", lisons-nous chez Ézéchiel (36, 26-27).

Au jour de l'Ascension, Jésus avait rejoint son Père dans la gloire du ciel. Dix jours plus tard, le Père et le Fils envoient leur Esprit sur les apôtres pour les guider et les soutenir dans la mission.

Ainsi Jésus remplit la promesse qu'il serait avec eux pour toujours jusqu'à la fin du monde (Mt 28, 20). Pouvait-il équiper de meilleure façon ceux qu'il avait envoyés de par le vaste monde ? Ce que l'on a dans le cœur ne peut se perdre et personne n'arrivera à le dérober.

Selon les paroles de Jésus à la Cène et les enseignements de Paul dans ses lettres, l'Esprit agit en nous sans répit. Il s'en suit que nous ne sommes jamais laissés à nous-mêmes, que ce soit face aux traquenards du malin ou au sein des difficultés venant des éléments de la nature ou des événements de l'histoire.

Nous pouvons toujours compter sur une force à laquelle rien ne résiste. Cette même force a soutenu la patience des martyrs, l'audace des missionnaires et la fidélité des saints. Elle accompagne et fortifie aussi la réalisation du devoir d'état, accompli au quotidien, au fond d'une cuisine ou d'une mine, au bureau ou à l'usine, sur la mer ou dans les airs...

Face à l'avenir

Comment ne pas déborder de confiance dans l'avenir quand l'Esprit se porte garant de notre espérance ? Ce qu'il a commencé de réaliser en nous, l'Esprit le mènera un jour à sa plénitude : " Nous le savons en effet, toute la création jusqu'à ce jour gémit en travail d'enfantement. Et non pas elle seule : nous-mêmes qui possédons les prémisses de l'Esprit, nous gémissons nous aussi intérieurement dans l'attente de la rédemption de notre corps. Car notre salut est objet d'espérance ; et voir ce qu'on espère, ce n'est plus espérer : ce qu'on voit, comment pourrait-on l'espérer encore ? Mais espérer ce que nous ne voyons pas, c'est l'attendre avec constance " (Rm 8, 22-25).

Avec le jour de la Pentecôte, s'est ouvert le temps de l'Église, temps de la mission et des persécutions, temps de l'attente joyeuse et de l'espérance du retour de Jésus.

Les groupes du Renouveau charismatique ont retrouvé l'appel des communautés évangélisées par l'apôtre saint Jean : " Marana tha ! " " Amen, viens, Seigneur Jésus ! " Il y a là bien plus qu'une litanie de petite vieille, car ce sont l'Esprit et l'Épouse, soit l'Église, qui prient ainsi (cf. Ap 22, 17).

Pas question entre-temps de se croiser les bras et de laisser venir l'avènement définitif du Royaume de Dieu. Jean-Paul II nous avertit que l'espérance se vit dans le milieu social où nous sommes insérés et dans l'histoire du monde (Tertio millenio ineunte, § 46).

Mgr André Léonard formule ce commentaire : " L'espérance chrétienne appelle les libérations humaines et elle est d'autant plus vraie qu'elle s'y exprime sans pouvoir cependant s'y épuiser ; et les libérations humaines appellent, selon leur logique propre, le salut ultime visé par l'espérance chrétienne, et elles sont d'autant plus vraiment humaines qu'elles s'ouvrent à l'espérance chrétienne sans pourtant s'y dissoudre. "

Nous avons d'abord à répandre " la bonne odeur du Christ " sur la terre des hommes si nous voulons un jour entrer dans la maison du Père.

L'Esprit de Pentecôte nous garde dans l'espérance. Il est en nous comme une source : malgré les étés de sécheresse, l'eau vive peut toujours jaillir pour apaiser ma soif. Il ressemble encore à un feu : des braises peuvent longtemps dormir sous la cendre froide, mais des flammes pourront jaillir pour me réchauffer dans l'hiver glacial.

Comme l'écrivait le pape dans son best-seller Entrez dans l'espérance : " Il est très important d'entrer dans l'espérance, non pas pour s'y arrêter, mais pour nous laisser emporter en avant par celle-ci. "

C'est l'Esprit de Pentecôte qui pousse, n'allons pas appliquer les freins !

L'abbé Paul-Émile Vignola est répondant pour le Renouveau charismatique du diocèse de Rimouski. Il est aussi membre du Comité de rédaction de Selon Sa Parole.

Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC) traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église
Selon Sa Parole mai-juin vol. 28 numéro 3


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Dernière mise à jour 10 décembre 2002

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