Evolution des écosystèmes de la région de St Martin de Londres (Hérault), par télédétection et Système d’Information Géographique. |
I Objectifs du projet européen DeMon
Depuis le milieu des années 80, la communauté européenne
a cherché à répondre à la menace de la progression
de la
désertification dans les régions méditerranéennes.
Elle a entrepris des programmes majeurs en recherche fondamentale et
appliquée (EPOCH, 1989-1992 ; ENVIRONNEMENT, 1991-1994). Ces
programmes intègrent notamment des
projets multidisciplinaires destinés à la compréhension
des processus de dégradation qui résultent de la mauvaise
gestion
des sols et des ressources en eau, de la sécheresse progressant
sous l’effet des changements climatiques. Il apparaît donc
évident que la dégradation dans ce contexte a besoin
d’être traité à différentes échelles
significatives et avec des
indicateurs appropriés afin d’analyser ses conséquences
et de définir des stratégies de maîtrise du phénomène
particulièrement dans le bassin méditerranéen.
Dans sa requête pour les mesures à définir lors
de la conférence des Nations Unies sur l’environnement et le
développement en 1992, le parlement des états membres
concernés demandait explicitement la préparation à
un
programme pour l’acquisition des données, le traitement des
informations et l’observation systématique des régions
vulnérables à la désertification et à la
sécheresse. Aujourd’hui, l’inventaire environnemental et la surveillance
continue à
l’échelle régionale forment la base pour la mise en œuvre
de plans de gestion des ressources des sols méditerranéens.
C’est dans cette perspective qu’ont été conçus
les projets DeMon et DeMon-2 (Desertification Monitoring).
Le projet DeMon-2 est un projet financé par la Commission européenne
(DG XII) pour une durée de 3 ans (1995-1998) qui vise à démontrer
la possibilité de suivi par télédétection spatiale
des processus de désertification dans le bassin
méditerranéen. Cette démonstration concerne l’analyse
comparative de l’évolution durant les 20 dernières années
de
plusieurs sites méditerranéens (Grèce, Espagne,
Italie, France, Tunisie) à partir des données de télédétection
à haute
résolution spatiale (Landsat-MSS et Landsat-TM) et de données
à basse résolution spatiale (NOAA-AVHRR). Les
cartes thématiques dérivées sont relatives aux
états de surface des sols, au pourcentage de recouvrement du sol
par la
végétation verte, et à divers indices de sensibilité
à la dégradation. L’un des résultats les plus important
dans ce projet est
d’identifier les indicateurs des processus de dégradation dans
le bassin méditerranéen. Les plates-formes de télédétection
(spatiale et aéroportée) et les systèmes de télédétection
utilisés (Landsat-TM, MSS / NOAA-AVHRR / AVIRIS /
DAIS) doivent permettre une mesure et un suivi de ces facteurs. A terme,
le projet DeMon devra permettre la mise en
place d’un observatoire de l’environnement pour l’ensemble du Bassin
Méditerranéen.
II Etude des écosystèmes de la région de St Martin de Londres au sein du projet DeMon
Le Languedoc est une région caractéristique des
écosystèmes méditerranéens et notamment des
processus d’évolution
spontanée de ceux-ci. Mis à part les impacts environnementaux,
dus aux développements urbain et agricole et aux feux
occasionnels, la région du Languedoc est une zone d’étude
idéale pour le suivi de l’évolution des sols et de la couverture
végétale, résultat d’une diminution de la pression
humaine. Elle peut servir de référence en vue de la comparaison
avec
d’autres zones subissant des perturbations plus marquées.
La région du Languedoc a donc été retenue comme
zone privilégiée de cartographie végétale,
en raison de la
connaissance des écosystèmes, mais aussi pour les nombreuses
données cartographiques disponibles depuis 1946. A
partir de l’analyse rétrospective de 9 scènes Landsat-TM,
il sera possible d’une part d’évaluer les méthodes et techniques
de levées utilisées et d’autre part de simuler l’évolution
future des écosystèmes méditerranéens, du moins
de la région du
Languedoc, par intégration des données dans un Système
d’Information Géographique. Des sites expérimentaux choisis
dans la région du Languedoc ont permis de fixer les bases des
traitements des données et permettent d’évaluer les
résultats de cartographie des écosystèmes et des
sols par télédétection, en référence
à l’ensemble des données
disponibles.
Même si la perspective d’un tel projet est de quantifier par télédétection
les changements de la végétation naturelle de St
Martin de Londres, les résultats doivent néanmoins permettre
de montrer la pertinence des systèmes de télédétection
à
évaluer les degrés de densification ou de dégradation
de la végétation, notamment en réponse aux incendies
et aux coupes des bois.
III Etapes d’analyse
En introduction, il convient de comprendre les processus de désertification
en terme de dégradation des sols et des
écosystèmes selon une approche environnementale. La définition
des différents paramètres permettant d’évaluer les
phénomènes de dégradation est sans doute à
la base du choix des systèmes de télédétection
retenus pour le projet
européen DeMon. Ces systèmes d’évaluation à
distance ont permis et permettront à la fois un suivi environnemental
et la
création de modèles d’érosion et d’évapotranspiration
à l’échelle locale et régionale du bassin méditerranéen.
Préalablement à toute exploitation des données
à notre disposition, une connaissance appropriée des sites
est requise.
Compte tenu de la complexité des signatures des objets au sol,
une recherche des caractéristiques végétales, géologiques
et des formations superficielles est donc indispensable. D’une part
cette recherche est nécessaire à l’étalonnage des
systèmes de télédétection et à la
correction des données à référence spatiale,
d’autre part, elle permet de comprendre les
réponses des capteurs et de proposer des méthodes de
classification (base de données spectrales).
En parallèle à cette première étape, des
notions constituant la base de la cartographie des sols et de la végétation
par
télédétection doivent être maîtrisées.
Ce sont les notions de classes de couverture végétale et
d’indices spécifiques de
végétation. Chacune d’elles est issue de la recherche
de méthodes empiriques pour caractériser les sols et la végétation.
Les classes de couverture végétale regroupent les concepts
de structure et de composition végétale. C'est concepts sont
plus adaptés à la photo-interprétation sur produits
issus de la télédétection aéroportée.
Les indices spécifiques de
végétation sont des fonctions mathématiques incluant
les bandes spectrales pour lesquelles la réponse de la végétation
caractérise le mieux l’activité chlorophyllienne ou le
recouvrement végétal. Ces indices sont actuellement utilisés
en
télédétection spatiale.
Afin de réaliser une cartographie végétale sur
image Landsat-TM, deux approches sont possibles pour la classification
thématique : l’approche empirique qui consiste à estimer
le taux de recouvrement végétal à partir d’indices
spécifiques de
végétation et l’approche physique qui permet de classer
les pixels suivant des méthodes semi-automatiques ou
automatiques.
Disposant de données cartographiques précédant
et suivant chronologiquement les neuf scènes Landsat-TM de 1984
à
1996, une base de travail intéressante consiste à évaluer
efficacement les méthodes de classification sur les scènes
dont
les dates d’acquisition se rapprochent le plus de celles des données
disponibles. De fait, un type de classification pourra
alors être appliqué à l’ensemble des scènes
afin de quantifier l’évolution des écosystèmes de
la région de St Martin de
Londres. C’est donc à partir d’un travail sur carte " Debussche
et Hétier " des principales formations ligneuses de 1979 et sur
image Landsat-TM 1984 qu’il a été possible de proposer une
classification parmi les différentes méthodes
expérimentées. Néanmoins, l’application de cette
méthode de classification à toutes les scènes Landsat-TM
ne sera
vraiment pertinente que si cette méthode fait l’objet d’une
autre évaluation. Dans cette optique, les photographies
aériennes IGN de 1996, la carte " Debussche et Hétier
" des espèces végétales de 1979 et l’image Landsat-TM
de 1996 a permis de justifier le choix de la méthode de classification
retenue pour l’ensemble des scènes Landsat-TM.
Une étape supplémentaire indispensable pour valider définitivement
l’ensemble des méthodes de classification a été
retenue. Elle s’articule autour :
- de la comparaison des produits de classification
avec un produit considéré comme " vérité terrain
" (Evaluation des
degrés de corrélation entre
les produits de classification sur image Landsat-TM de 1984 et la carte
numérisée des
formations végétales de 1979)
;
- des résultats issus de la photo-interprétation
et d’une campagne de terrain (méthode utilisée pour l’évaluation
définitive des produits de classification
sur image Landsat-TM de 1996).
L’analyse de l’évolution du couvert végétal de
1984 à 1996 à partir de la méthode de classification
retenue (par indice
NDVI) a donc permis d’extraire des résultats relatifs à
l’évolution de la couverture végétale et des sols
de la région de St
Martin de Londres.
IV Résultats et perspectives du projet DeMon au sein de l’Union Européenne
L’estimation des superficies des différents types de couverture
végétale sur une période de 12 années a permis
de
constater que globalement, la végétation tendait à
se densifier puis à se stabiliser en superficie, dans la région
de St Martin de Londres. D’autre part, la cartographie végétale
par télédétection a révélé des
zones touchées soit par les coupes de
bois, soit par les incendies.
Ainsi, la cartographie à l’échelle locale et régionale
ne constitue plus seulement un besoin pour avoir une meilleure
compréhension des phénomènes mais aussi une importante
initiative pour la réalisation de plans de développement
durable en région méditerranéenne. C’est dans
cette perspective du projet DeMon, que la région de St Martin de
Londres (site de référence) a fait l’objet d’une modélisation
des sols et des écosystèmes pour les études à
venir dans le
bassin méditerranéen.
Les systèmes de télédétection sont donc
des instruments indispensables pour contribuer à pallier les manques
de levés à
l’échelle des temps et à l’échelle régionale.
La télédétection aéroportée ou spatiale
est un moyen efficace de suivi de
l’environnement même si elle ne constitue pas en elle-même
une solution aux problèmes complexes de désertification.
Ces systèmes de télédétection deviennent de
plus en plus opérationnels, ce qui est un avantage compte tenu de
l’énorme
variété des types de végétation et de sol
dans le bassin méditerranéen.