L’islam est un système global comprenant des éléments
invariants qui sont les règles canoniques immuables dans le temps
et dans l’espace et des éléments variants que les Foqahas
sont capables d’édicter, selon l’analyse des situations particulières
et évolutives. La Charia’ englobe les dimensions morale, économique,
sociale et politique de la vie quotidienne. Aussi, est-il naturel que l’islam
régisse les transactions économiques et bancaires. Le Riba
(usure) ne se limite pas en islam à la seule notion de l’usure,
mais couvre également l’intérêt est particulièrement
visé ici. Les divers débats contemporains qui ont eu lieu
à travers le monde islamique, cherchant à légitimer
de manière intéressée l’intérêt bancaire
se sont tous heurtés à la clarté des règles
canoniques et à la rigueur de l’analyse économique avancées
par les “ conciles ” de Foqahas réunis pour la cause, notamment
celui de 1972 qui a conclu par consensus Ijmaa à la prohibition
de l’intérêt.
Le statut de la monnaie se limite dans la vision islamique à
la réserve de valeur et au moyen d’échange, sans jamais être
une marchandise qui se vend ou se loue. Ainsi, si l’on reconnaît
au temps une valeur monétaire, celle-ci n’est légitime que
dans les échanges de biens (vente à tempérament),
pas dans les situations de dette-créance (crédit en général).
L’argent ne peut créer à lui seul de l’argent, sans l’action
du capital physique et du travail. En outre, la relation entre ces facteurs
doit être solidaire, et leur rémunération équitablement
partagée. C’est ainsi que le système financier islamique,
avec comme noyau les banques islamiques se présente comme alternative
moderne et opérationnelle.
La philosophie des banques islamiques est donc basée principalement
sur ces deux axes : 1. Les achats et ventes à tempérament
en guise d’alternative au crédit à court et moyen terme ;
2. La participation aux pertes et aux profits comme mode de financement
à long terme : “ nul bénéfice sans sacrifice ”. C’est
une formule très proche du Venture Capital ou Capital-risque.
La définition du rôle de la banque islamique est donc
de procéder à la collecte de dépôts sous forme
de contrats de Modaraba et de les replacer auprès de ses clients
en usant de modes de financement à tempérament ou participatifs,
sans oublier les autres services bancaires traditionnels. Son fonctionnement
exclut toute forme d’intérêt.
Les emplois des banques islamiques se composent : 1. des financements
accordés aux tiers, 2. des investissements et placements directs
sur les marchés immobilier, boursier et des biens & services,
3. des prêts sans intérêt (qard hassan) et 4. de la
zakat sur les fonds propres et éventuellement sur les dépôts
sur ordre du client. Le premier type d’emplois reste évidemment
dominant. On peut le catégoriser ainsi :
* Le financement de la consommation :
Trois types de financement sont à citer dans ce cadr
: a) financement des dépenses d’équipement domestique par
la vente à tempérament (Mourabaha). b) financement du logement
par la vente à tempérament, voire par le leasing immobilier,
s’il peut s’étendre aux particuliers .c) financement des dépenses
de consommation courante par le prêt sans intérêt ou
facilité de caisse gratuite (qard hassan).
* Le financement de la production :
Quatre types de financement peuvent être prévus.
a) Le financement des immobilisations essentiellement par la participation
au capital sous forme d’association (Moucharaka). b) Le financement de
l’équipement par le leasing (mobilier), et qui est une forme de
financement légale sous certaines conditions c). Le financement
du fonds de roulement et/ou de l’équipement par la vente à
tempérament, et particulièrement la vente d’équipements
selon la commande de l’acheteur donneur d’ordre (Mourabaha lil’amiri bi
chira’) ou encore par le pré-financement (Salam). d) Le financement
du fonds de roulement et/ou de l’équipement par le contrat de fiducie
(Moudaraba). C’est un contrat par lequel un financier met des fonds à
risque à la disposition d’un commandité, qui les gère
dans le cadre d’opérations plus ou moins déterminés,
les bénéfices de l’opération étant partagés
entre les deux selon un prorata pré-convenu.
Les ressources des banques islamiques se constitue d’une part
des ressources internes telles que le capital, les réserves, les
profits, d’autre part des ressources externes telles que les dépôts
à vue, comptes bloqués à rémunération
participative ou compte d’épargne et enfin les revenus des projets
et placements et les commissions de gestion.
Les implications économiques de la banque islamique sont
les suivantes :
* Une population davantage et mieux bancarisée, grâce
à la couche sociale pieuse que l’on arrive à toucher ;
* Une sélection à la source des projets, puisque l’on
ne finance que ceux dont la rentabilité est sérieusement
étudiée, indépendamment des garanties réelles
engagées ;
* Une “ assistance liée ” en matière de gestion de la
part de la banque, dans la mesure où le bénéfice que
celle-ci escompte est tributaire du profit dégagé par le
projet ;
* Une promotion de l’investissement, en raison de l’encouragement que
provoque la formule de capital-risque auprès des investisseurs potentiels
;
* La promotion d’une forme de capitalisme populaire, grâce à
la transformation des déposants de la banque en détenteurs
de parts dans des projets économiques ; La promotion du développement
régional facilitée par la culture et la pratique de proximité
que développe la banque avec ses clients.
Les implications sociales de la banque islamique sont les suivantes
:
* La solidarité entre bailleurs de fonds et investisseurs, à
travers la formule participative ;
* La moralisation de l’activité économique à travers
l’éthique que développe la banque islamique à travers
son réseau de clients et partenaires ;
* La contribution à la redistribution des revenus, par la mobilisation
structurée des fonds de Zakat.
En conclusion, on peut dire que la banque islamique répond
à des attentes populaires, qu’elle garantit une bonne rentabilité
économique à l’échelle micro & macro-économique,
et qu’enfin, elle véhicule une attitude d’esprit nouvelle qui inscrit
l’activité bancaire dans la sphère de l’économie réelle.