Conter, un art ? Propos sur l'art du conteur &endash; 1990-1995. Mouilleron-le-Captif, La Loupiote (Tapage de conteurs, Écrit et crac n° 1), 1997, 158 p.
Un bouquet de treize textes de Michel Hindenoch &endash;contributions à des colloques ou parutions dans la revue Dire de 1990 à 1995&endash; et voici la matière d'un petit livre à savourer, que l'on s'intéresse au conte ou pas, du reste, puisqu'il suffit, pour y prendre plaisir, d'être gourmand de mots. Avec ce petit manuel (oui, oui, on peut dire que c'en est un!), nous sommes loin, bien loin, des recettes toutes faites, des trucs-pour-stagiaire-assidu(e), et plus loin encore du va-donc-et-que-je-te-conte-comme-je-te-parle. Non, ici, l'exigence se fait poésie, et la parole écoute. Alors, pour vous mettre en bouche, écoutez juste ce petit passage à propos des oreilles, p. 82: «Petites coquilles offertes, fleurs ourlées, délicates, ouvertes sur le monde, images retournées de notre corps avant de naître, cette forme subtile de notre peau danse avec le moindre émoi de l'air. Elles reconnaissent la respiration de l'être cher, son pas dans l'escalier, un chant d'oiseau, une mouche, une averse, la page tournée d'un livre, l'impatience des doigts sur la table, la fraîcheur du vent dans les arbres, le sourire de la rame dans l'eau, les mots chuchotés, murmurés, offerts, les prières, les révoltes, les aveux, les surprises, les plaisirs: elles sont notre conscience du chant du monde». Qu'ajouter? Peut-être que les oreilles ont souvent des boucles. Et que d'aucuns étymologistes chuchotent, dit-on, que, ces boucles, venant du latin buccula, ne seraient autres que des «petites bouches». Et qu'avoir une «petite bouche» dans les oreilles, c'est plutôt bon signe pour un conteur. Mais chut! Assez de vent: vous qui voulez conter, lisez ce livre.