Il n'y a presque pas de tribu paienne où l'on ne trouve la croix. Elle était adorée par les Celtes païens longtemps avant l'incarnation et la mort de Christ1. « C'est, dit Maurice, un fait remarquable et bien confirmé, que les Druides avaient coutume de choisir dans leurs bois l'arbre le plus grand, le plus beau, pour en faire un emblème de leur divinité; ils coupaient les petites branches, et attachaient deux des plus fortes à la plus haute partie du tronc, de telle manière que ces branches s'étendaient de chaque cotés comme les bras d'un homme, et presentaient avec le corps l'aspect d'une énorme croix; sur l'écorce, en plusieurs endroits, ils gravaient aussi la lettre Tau2.» Elle était adorée au Mexique longtemps avant que les catholiques romains n'y eussent pénétré; On y élevait de grandes croix de pierre, sans doute au dieu de la pluie3. La croix ainsi adorée par beaucoup de nations ou regardéc comme un emblème sacré, était le symbole indubitable de Bacchus, le Messie Babylonien, car il était représenté ayant sur la tête un bandeau couvert de croix. Ce symbole du dieu Babylonien est aujourd'hui en honneur dans toutes les immenses landes de la Tartane, ou domine le Bouddhisme, et la manière dont on l'y représente fournit un commentaire frappant du langage dont Rome se sert pour désigner la croix. Bien que la croix,dit le colonel Wilford, dans les Recherches asiatiques, ne soit pas un objet de culte chez les Boudhas ou Bouddhistes, c'est leur devise et leur emblème favoris. C'est absolument la croix des Manichéens, avec des fleurs et des feuilles. Cette croix qui produit des feuilles et des fleurs (et un fruit aussi, dit-on), est appelée l'arbre divin, l'arbre des dieux, l'arbre de la vie et de la connaissance, produisant ce qui est bon et désirable, et se trouve dans le Paradis terrestre4(fig. 46). Comparez ceci avec la manière dont Rome parle de la croix et vous verrez combien la coïncidence est exacte.(suite texte)
Dans l'office de la croix,
elle est appelée l'arbre de vie, et on enseigne à ses adorateurs
à l'invoquer ainsi: « Salut, O Croix, bois triomphal, véritable
salut du monde, de tous les arbres il n'en est point un seul dont les feuilles,
les fleurs, les boutons puissent être comparés aux tiens!
0 Croix, notre seule espérance,
augmente la justice de l'homme pieux, et pardonne les fautes du pécheur6.
» Peut-on Croire en lisant le récit
scripturaire de la crucifiction que ce récit ait jamais Pu se transformer
en cette bizarrerie de feuilles, de fleurs et de boutons, qu 'on
trouve dans l'office romain. Mais si on considère que la croix Bouddhiste,
comme celle de Babylone, était l'emblème certain de Tammuz,
qui était connu comme la branche de gui, ou Celui qui guérit
tout, il est facile de voir pourquoi l'initiale sacrée est couverte
de feuilles, et pourquoi Rome, en l'adoptant, l'appelle, le «
remède qui maintient la santé, guérit les maladies
et fait ce que le pouvoir seul de l'homme ne pourrait jamais faire. »
Or, Ce symbole païen parait s'être
introduit tout d'abord dans l'Eglise chrétienne d'Egypte, et dans
l'Afrique entière. Une déclaration de Tertullien, vers le
milieu du troisième siècle, montre à quel point l'Eglise
de Carthage était alors infectée du vieux levain 7.L'Egypte
en particulier, qui n'a ja mais été entièrement évangélisée
semble avoir la première, introduit ce symbole païen. La première
forme de ce qu'on appelle la croix chrétienne, découverte
en Egypte sur des monuments chrétiens, est évidemment le
Tau paien, ou signe de vie égyptien. Que le lecteur lise avec soin
ce passage de Wilkinson: «On peut citer un fait bien plus curieux
concernant ce caractère hiéroglyphique (le Tau), c'est que
les premiers chrétiens l'ont adopté au lieu de la croix,
qui, plus tard, lui fut substituée; ils le mettaient en tête
des inscriptions comme on le fit plus tard pour la croix. Car, bien que
le docteur Young ait des scrupules à croire les déclarations
de sir A. Edmons-tone, d'après lequel on la trouve aussi dans les
sépulcres de la grande oasis, je
puis affirmer que ce dernier a raison et que beaucoup d'inscriptions avec
un Tau en tête sont conservées encore aujourd'hui sur les
premiers monuments chrétiens 8.»
Voici évidemment ce qu'il faut conclure de cette déclaration:
en Egypte, la première forme de ce que plus tard on appela la croix,
n'était autre chose que la Crux Ansata, ou le signe de la
vie, porté par Osiris et tous les autres dieux égyptiens;
que l'ansa ou manche fut plus tard mis de côté et devint le
simple Tau ou la croix ordinaire comme on l'a aujourd'hui et que, en la
mettant sur les tombes, on n'avait nullement l'intention de rappeler la
crucifixion du Nazaréen, mais c'était simplement le résultat
d'un profond attachement aux anciens symboles paiens, attachement toujours
puissant, chez ceux qui, malgré le nom et la profession de chrétiens,
sont encore, dans une large mesure, païens de coeur et de sentiment...
C'est là et là seulement l'origine de l'adoration de la croix.
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1.CRABB, Mythologie, p. 163.
2.MAURICE, Antiquités indiennes, Tome VI, p. 1.
3. PRESCOTT, Conquète du Mexique, Tome I, p. 242.
4. Recherches Âsiatiques. Tome X, p. 124.
5. Les, deux croix du haut sont des étendards de nations païennes et barbares de l'orient, (BRYANT, Mytho1ogie, vol. III, p. 127.) La croix noire du milieu est le Tau sacré des Egyptlens, ou le signe de vie (WILKIN5ON, vol. V, p. 283.) Les deux d'en bas sont des croix Bouddhistes, extraites des Recherches asiatiques, vol. X, p. 124.
6. Revue de L'Epitre du Dr GENTIANUSHARVET de Louvain, p. 351. Voici l'une des stances de cette hymne dans l'original:
« O crux, 1ignum triomphale
Cette hymne a été mise en vers par les Romanistes de l'Eglise anglaise et publiée avec d'autres de la même origine, il y a quelques années, dans un volume intitulé : Dévotion de la passion.Mundi vera salus, vale,
Inter ligna nullum tale
Fronde, flore, germine. »
Les annales de Londres, avril 1832, donnent le spécimen suivant de ces dévotions présentées par ces loups en vêtements de brebis aux membres de 1'église d'Angleterre:
O croix fidèle, arbre incomparable,
Aucun arbre ne produit des feuilles, des fleurs,
Des boutons semblables aux tiens.
Doux est le bois, doux est le poids,
7.Tertullien, De corona militis, ch. III, Tome II, p. 80.Doux sont les cloux qui te traversent,
Bois délicieux! »
#retour texte6
8.Wilkinson, Tome X, p. 283-284.